Histoires de nature - Histoires de nature à la soirée E=MJC à Palaiseau

Evénement

Publié le 24/05/2024

Histoires de nature: Déjouer l'amnésie envrionnementale? Une soirée organisée par la MJC - Théâtre des Trois Vallées de Palaiseau dans le cadre de "Végétale Cité".

"Fermez les yeux, plongez dans un souvenir de votre enfance dans la nature. Prenez le temps, ouvrez les yeux, dessinez ce souvenir et écrivez une phrase ou deux". C'est l'invitation lancée par Asma Steinhausser, organisatrice de cette soirée et présidente du conseil d'administration de la MJC, pour ouvrir notre moment de partage.

On accroche les croquis sur le mur puis on prend quelques instants pour détailler la définition scientifque de l'amnésie environnementale*, et la façon dont le Muséum national d'Histoire naturelle se saisit aujourd'hui de ce concept pour penser des actions.

Peut-on déjouer l'amnésie environnementale, si oui comment? En écrivant une mémoire collective? En multipliant les expériences directes de nature? Par l'art?

Alors on se tourne vers le mur aux souvenirs que l'on vient de créer. Les dessins et les mots décrivent des tableaux variés: cueillir des cerises après l'école pour gagner la pièce, planter des arbres à chaque promenade avec son père, être au milieu des papillons dans un champ de salades à la fin des années 1960, se baigner dans la rivière avec les cousins et le papy dans les Deux-Sèvres, on parle de champs, de cascades, de forêts, de jardins, de collines, de coquelicots et de mares aux tétards…

Puis, en tant que coordinatrice du programme Histoire de nature, je soumets quelques questions à la discussion: “Que pensez-vous maintenant de l'articulation entre votre souvenir et une histoire à une échelle plus large? Auriez-vous envie de partager ce souvenir dans une collection de muséum?”.

Les discussions vont bon train. “Mon souvenir est-il vraiment relié à une histoire plus large? Et que dire de la déformation que nos mémoires opèrent sur ce que l'on a vécu?” Mais soudain dans la salle, les souvenirs se répondent. “Quand vous avez parlé des papillons, tout à coup j'ai eu ce flash, le souvenir m'est revenu!” “Et vous, quand vous avez parlé d'hirondelles, j'avais oublié les hirondelles!” Bien sûr notre mémoire produit des souvenirs intimes, images d'un moment vécu… Mais déjà quelle épaisseur de ces vies que l'on se raconte, et cette épaisseur commence, on le voit dans le temps de cette discussion, à composer l'histoire! Car cela crée du lien entre nous, et s'articule ensuite avec ce que l'on peut comprendre d'autre sur la question des papillons et des hirondelles.

“Partager des choses intimes, ce n'est pas si évident, si d'autres font comme moi alors ok, mais si je suis la première?” Cette remarque nous amène à réfléchir à la façon dont un Muséum peut prendre soin du témoignage qui lui est confié, pour reprendre les termes de Mélodie Faury. Nous réfléchissons aussi aux liens à tisser entre le Muséum et les personnes ou groupes de personnes qui nous confient des copies de leurs objets, documents et leurs témoignages, aux façons de mettre en valeur, de transmettre ces contributions et de les faire dialoguer.

Une autre remarque anime nos échanges: “Peut-on vraiment transmettre à nos enfants des souvenirs sur des choses qu'ils et elles ne verront jamais? Qui ne sont pas leur quotidien?” Une personne témoigne depuis son expérience associative d'observation de la nature par les enfants et de jardinage avec eux. Ensemble, petits et grands apprennent à observer ce qui les entoure. Les papillons ne se voient peut-être pas partout, mais dans le jardin de l'association, on en trouve. L'occasion de découvrir que telle et telle plante les font revenir, alors on peut avoir envie de recréer des espaces où ils peuvent venir, ou de protéger ceux qui existent?

Une soirée d'une grande richesse, qui se termine autour du stand de la librairie La Fontaine aux livres, à découvrir des romans, essais, albums et BD pour tous les publics, des livres qui inspirent, qui font rêver ou réfléchir, ou tout ensemble!

Un immense merci à la MJC - Théâtre des Trois Vallées de Palaiseau pour son accueil si chaleureux et pour avoir organisé cette rencontre qui donne tant de sens à un programme de science participative comme Histoires de nature! Et peut-être à très bientôt pour une mission “Histoires de nature à Palaiseau, Villebon, Orsay…”?

*On parle aussi d’amnésie écologique, d’amnésie générationnelle ou encore de shifting baseline syndrome. Ce concept décrit le fait que chaque individu considère l’écosystème qu’il connaît dans son enfance comme le point de référence initial, comme ce qui lui paraît « normal », même si l’état de cet écosystème est peut-être dégradé par rapport à un état antérieur. Il est proposé par le psychologue environnemental Peter Kahn dès 1995 et par le biologiste Daniel Pauly la même année. Pour en savoir plus, voici quelques ressources: